Renversé sur le fauteuil de barbier, le canard se fait cirer le bec et tondre allègrement le derrière. À l’image de Donald Duck chez le coiffeur, ce pays marche sur la tête depuis un certain temps.
La scène politique sénégalaise durant ces trois dernières années semble irréelle. On dirait un feuilleuton de dessin animé qui se joue avec de mauvais acteurs. Plein de rebondissements, il n’a pas encore atteint son épilogue et risque de nous plonger dans une crise sans précédent.
Le projet démocidaire de musellement du peuple reste encore de vigueur, malgrè l’état boiteux du chef de gang qui refuse de jouer le figurant dans les dernières heures de son magistère. Il aura détourné toute l’attention sur lui pendant les trois semaines reservées aux autres membres du pagayage aspirant à lui succéder. Du jamais vu, un lame duck président qui annule des élections pour mener sa campagne à lui.
Que se passe-t-il à Ndoumbélane?
La politique est bien un ”jeu”, non pas dans son sens puérilement ludique, mais dans l’essence scientifique et stratégique du terme. La gestion d’un état c’est du sérieux, et on ne joue pas avec le peuple à travers qui le suffrage divinement universel s’exhauce. Nous sommes loin du playground de l’école où le ”bully”, ce gaillard intimidant, peut s’accaparer à sa guise de la balançoire (njoowaan) sous le regard dégouté de ses innocents camarades.
Les règles du jeu délimitent la marge de manoeuvre, mais les règles non écrites sont tout aussi importantes. Elles sont du ressort de la morale, de la diginité humaine et de la perception populaire. Par horreur du vide, on ne neutralise pas ses adversaires en politique, on les surveille de près car leur position détermine tout aussi bien notre action.
C’est cette tragédie qui paradoxalement équilibre le jeu pour le bien commun. Celà est aussi valable pour les tenants du pouvoir que pour l’opposition. Le populisme radical, les deals combinés sur le dos du peuple, sous forme de dialogues publiques ou souterrains n’auront aucune issue durable dans l’échiquier.
Une démocratie viable dialogue à travers les représentants du peuple au parlement. Le président de la république doit rester au dessus de la mêlée. Il peut par moments traverser son ilôt pour consulter le chef de l’opposition, ou tout au moins les présidents de groupes parlementaires, sur les graves questions qui méritent un consensus. De toutes les façons pourquoi dialoguer sur la fixation d’une simple date, une décision qui de surcroit vous incombe exclusivement, de manière bien encadrée et délimitée par la constitution?
L’équilibre est aussi dans la séparation respectueuse des pouvoirs, la justice ayant toujours le dernier mot. Même cet autre Donald, cette fois-ci Trump, avec sa toute puissance planétaire, ne pourrait que se plier à la décision du juge, fut-il d’un petit était insulaire du Pacifique. Un juge de Hawaii s’est opposé en 2017 de sa décision de bannir l’entrée aux États-Unis des ressortissants de sept pays d’Afrique et du Moyen-Orient. Voilà un système qui fonctionne quoique perfectible.
Ce n’est rien d’autre que du banditisme d’état que de vouloir reporter, à quelques heures du démarrage de la campagne électorale, ces élections déjà fixées au 25 février 2024. Le vote à la hâte de la proposition de loi pour le report du scrutin, sous l’invasion de l’assemblée par la gendarmerie nationale, vient confirmer le coup de force que ce régime veut imposer.
Une élection présidentielle n’a jamais été reportée au Sénégal. Heureusement que le Conseil constitutionnel vient sauver la fâce sous la pression du peuple et de la communauté internationale. Il a statué de l’anticonstitutionnalité de de cette proposition de loi et du decrét d’annulation de la convocation du collège électoral; mais il aurait pu se limiter de tout commentaire et maintenir d’office, sans ambiguité, la date initialement prévue pour le scrutin. Dix jours
de campagne électorale auraient largement suffi et l’on serait épargné de ces incertitudes qui compromettent la stabilité socio-économique du pays.
Aujourd’hui 25 février 2024, jour de rendez-vous fachistement raté, reste toujours la date légale pour les élections, c’est la date au-delà de laquelle débutera la vraie crise. Nous voilà dans une impasse créée de toute pièce dont les motifs restent énigmatiques, avec divers complices. La candidature de Bassirou Diomaye Faye gènerait-elle au point de mobiliser toute cette armada d’anthropo-psychologues, de journalistes corrompus, et d’intérêts spéciaux?
La campagne de déconstruction ne marchera pas, le coup est déjà parti, ”Sénégal Mooy Diomaye”. À qui mieux qu’un énarque, comis de l’état pendant une quinzaine d’années, sobre et intègre dans la gestion, devrions-nous confier les reines du pays? Ont-ils peur d’une rédition des comptes? Tout porte à le croire avec leur farfelu projet d’amnistie de tous ces crimes perpétrés sous leur magistère.
Qu’avons-nous fait pour mériter une telle situation? Le péché est-il originel ou découle-t-il d’une destitution mal opérée, douze années auparavant? Qui voyait venir ce volte face historique aux velleités princières? Dans cette longue nage à contre courants, notre vaillant canard boiteux, ”champion” des tempêtes passées, qui balayait témérairement toute vague d’opposition, réalise tardivement que l’on arrête pas la mer avec ses ailes.
La République est résiliente des pulsions de restauration d’une royauté nostalgique fut-elle Damel, Teigne ou Lamtoro. Cette crise a eu le mérite de réveiller la conscience citoyenne chez les populations et augure d’une démocratie paraticipative plus sereine.
Le Sénégal est riche de son histoire et de ses traditions; sa diversité et son brassage culturel constituent sa force. Notre Goumbé, Gaadio, Ndawrabine ou Khoré Bassari peut se danser aussi bien à la pincée de la kora mandingue, qu’au rententissement des dioundioung sèrère ou du Xiin Baay Faal, mais aussi
au rythme du xalam pulaar. C’est ce soleil qui illumine notre espoir pour le salût d’une Afrique digne, libre, juste et prospère.
Vive La République! Vive La Renaissance Africaine!
Dr Djiby Fall
Responsable Politique MTN-MoTNa
Dakar, le 25 Fèvrier 2024